Je continue ma lente descente aupres du sud a bord du Grande Lagos. Constamment passe est synonyme de quelques degres En plus sur le thermometre et quelques degres de moins sur l’echelle des latitudes. Nous atteignons nos cotes de l’Afrique, de quoi me projeter deja dans la suite de ce flirt web week-end, au Benin. Je vous emmene cette fois dans la salle des machines avec une sequence hautement didactique (si si) concernant la consommation des geants des mers. Journees marquees egalement par la torpeur a l’ecoute des nouvelles en provenance de Paris. Puis vint le hurlement des sirenes a bord du cargo via un paisible dimanche apres-midi aussi que nous venions de passer au large des iles Canaries.
7 – 8 h 30 : latitude 40,64° nord, longitude 10,78° ouest, vitesse 14,1 n?uds.
La nuit fut agitee. Des pirates nous ont commande en chasse. Cela a fallu en hate calfeutrer l’ensemble des issues et pousser des machines a fond. Nah, c’est jamais bon, nuit calme, tel d’habitude avec a la cle de beaux reves. Inutile d’insister, je n’en dirai jamais plus !
Drole de vie que celle de marin. Ceux avec qui j’ai pu discuter jusqu’a present n’aiment pas vraiment un metier. Ce n’est nullement le taf en lui-meme qu’ils n’aiment gui?re, mais le fait qu’il les tienne eloignes de leur famille pendant si longtemps. Ils seront engages pour des actes notaries de 4 mois au minimum, le plus souvent 6 ou 7 mois concernant des matelots. Apres quoi ils rentreront quelque moment dans leur famille avant de repartir sur les mers, ainsi, ainsi va l’existence. Neanmoins, voila, il faudra bien travailler, ainsi, surtout pour les Philippins, les opportunites chez eux paraissent maigres.
Nous sommes au large du Portugal. Cet apres-midi, grand soleil. Je pourrais flaner via le pont sans aller les epaisseurs pour me proteger du vent. Aucune doute, ca sent le sud. Encore quelques jours et il fera veritablement chaud.
Durant l’apres-midi, visite en salle des machines avec le chef mecanicien. Sans surprise, le moteur du Grande Lagos est 1 tantinet plus gros que celui d’une voiture, c’est un veritable monstre. Je n’ai aucune photo a vous montrer, ainsi que dans la passerelle, les photos paraissent interdites dans la salle des machines.
Nous developpons actuellement 7 000 kW (soit 9 500 ch), pour une vitesse de 14 n?uds. Aller plus vite n’est pas un probleme en soi. Avec de bonnes conditions, le Grande Lagos va monter jusqu’a 20 n?uds, mais la facture carburant s’alourdit alors copieusement. Vous vous demandez surement combien consomme un cargo tel le Grande Lagos. Sans vent ni courant notoirement defavorables, a 14 n?uds, le navire consomme 34 tonnes de fioul via jour. Dit tel ca, ca semble enorme, mais sortons legerement nos calculettes. Ca represente 5 600 litres aux 100 km pour un poids total d’environ 60 000 tonnes (34 000 tonnes pour le poids du cargo a vide et 26 000 tonnes de chargement), soit 0,21 litre a toutes les 100 km via tonne transportee. A plein cure, on monte a 60 tonnes par jour, mais on ne monte normalement nullement a beaucoup cure, c’est trop couteux.
Ce week-end en cargo, c’est 1,6 l de carburant contre 170 l en avion
En resume de votre petit file tres didactique (avouez que meme Jamy n’aurait jamais fait plus), pour une voiture qui peserait une tonne, le week-end Anvers-Cotonou, c’est 16 l de fioul, autant penser pas grand chose trop ! Et pour ma pomme (
9 – 8 h 30 : latitude 35,10°, longitude 13,08° ouest, vitesse 15 n?uds. Cette nuit, nous avons change d’heure et recule les pendules d’une heure. Nous sommes maintenant au large de l’Afrique, a un tantinet plus de 600 km a l’ouest de Rabat. Notre mer reste toujours aussi calme, le ciel est bleu, une nouvelle journee belle et ensoleillee s’annonce, sauf que, en fera, non.
Alors que j’arrive au mess des officiers Afin de prendre mon petit-dejeuner, le second capitaine me demande si j’ai ecoute les infos ce matin. A sa tete et au ton grave qu’il emploie, j’ai deja devine la suite. Je ne suis pas pessimiste de constitution, mais depuis quelque temps libre, je tiens pour une evidence que le sujet n’est environ savoir s’il y aura 1 attentat, mais au moment oi? aura lieu le prochain. On est juste a esperer qu’il ne fera gui?re trop de victimes, et un tantinet egoistement, que nos proches seront epargnes. Mais a l’ecoute des informations (jusqu’aux Canaries, nous recevons la tele par satellite), j’habite choque et un tantinet hagard.
J’me rememore ce que je faisais hier jour. Tout etait si calme. Comme chaque soir, j’avais un tantinet flane tranquillement via le pont a percer le mystere une nuit qui entoure le cargo et a ecouter ronronner le moteur. Et pendant ce temps-la, Paris connaissait l’horreur.
Aujourd’hui, mon monde reste triste et endeuille. Si seulement on pouvait juste couper chacune des chaines d’info et ne garder que radio Bisounours. Ca ferait du bien des fois de vivre au monde des Bisounours.
Parmi les marins rencontres dans la salle de repos, certains, se rappelant que j’habite francais, me presentent leurs condoleances. J’en suis touche et emu. Leur humanite et leurs mots a mon egard reussissent a me rendre le sourire, ainsi, ca, c’est important un sourire. C’est ma maniere de communiquer quand je visite votre pays dont je ne parle pas la langue. Aujourd’hui, il va i?tre quelque peu force, mais demain, il reviendra.